33 personnes évacuées des cabines du téléphérique de Huy lors d’un spectaculaire exercice : “On s’est senti en super sécurité”
Les pompiers ont simulé ce mardi 23 avril 2024 une panne pour procéder à l’évacuation de passagers du téléphérique de Huy.
- Publié le 23-04-2024 à 19h35
Immobilisé au-dessus de la Meuse, en compagnie de 13 autres passagers, Fabien Abinal décroche le téléphone de secours de la cabine du téléphérique. À l’autre bout du fil, un conducteur lui confirme ce qu’il pressentait : l’engin est victime d’une panne, et les pompiers du Grimp (groupe d’intervention en milieu périlleux) de la zone Hemeco vont venir les secourir.
Il est 13 h 48 ce mardi après-midi, et ce n’est pas la panique à bord. Il faut dire que Fabien Abinal, responsable de projet au Cabinet grenoblois E.R.I.C, spécialisé dans le transport par câble, ainsi que les autres voyageurs savaient à quoi s’attendre en embarquant à la station Batta. Quatre jours avant la grande inauguration officielle du téléphérique, les services de secours ont en effet procédé à un ultime exercice d’évacuation des cabines. “Nous en avions déjà réalisé avec d’autres pompiers, notamment fin mars, mais pas avec de “vrais” voyageurs, précise le sergent Olivier Lefert, de l’unité spéciale du Grimp. Selon la législation, nous avons trois heures pour ramener les victimes de l’incident au sol.”
Ce mardi, ce sont en réalité trois exercices d’évacuation qui ont été menés. En matinée, dix personnes ont été secourues au-dessus d’une habitation, dans le chemin des Chapelles, environ 200 mètres au-dessus du virage Criquielion. L’après-midi, quatorze personnes ont été secourues au-dessus du fleuve, alors que neuf autres se sont retrouvées coincées au même moment dans la seconde cabine, non loin de la station de la Sarte.
Les cobayes ? Des membres du personnel communal, les quatre conducteurs du téléphérique ainsi que les deux responsables de l’accueil des futurs visiteurs, un riverain du parcours, un échevin, une institutrice, des responsables des entreprises qui ont mené le projet (Uman Architect, Cop&Portier, Cabinet E.R.I.C.), et des représentants de la presse.
Comment les opérations se déroulent-elles en pareille circonstance ? Fait-on appel à un hélicoptère ? Que nenni ! Les hommes du Grimp escaladent un pylône et rejoignent la cabine grâce à un dispositif motorisé SS20 qui permet de cheminer le long du câble. Quelques minutes plus tard, ce sont ainsi deux pompiers qui ouvrent la trappe se situant sur le toit de la cabine. L’un deux pénètre dans l’habitacle et rassure l’assistance pendant que l’autre prépare le matériel sur le toit. Cordages, harnais : tout est vérifié, avant la première évacuation. “Grâce à la présence d’un deuxième moteur, ce genre de sauvetage reste très rare, précise Fabien Abinal. Dans 99,9 % des cas, il est possible de rapatrier les passagers via la cabine sans évacuation verticale. Dans les Alpes, il y a énormément de téléphériques, et on recense une à deux évacuations par an. À Grenoble, beaucoup se souviennent de la panne du téléphérique de la Bastille le jour de l’inauguration en septembre 1976.” Pourvu que ça n’arrive pas samedi…
Descente en oblique dans le chemin des Chapelles
À peine cette précision apportée, que voilà déjà le premier passager, solidement attaché, invité à quitter ses compagnons d’infortune. “En matinée, l’exercice était plus compliqué puisque la présence d’une maison nous obligeait à pratiquer une descente en oblique avec trois cordes, précise le sergent Lefert. La cabine était immobilisée à une vingtaine de mètres du sol. Si le chemin des Chapelles n’était pas aussi pentu, nous aurions pu utiliser notre autoélévateur avec un bras articulé qui permet d’aller à 32 mètres de hauteur. Mais lors d’une intervention de ce type, le véhicule doit être parfaitement à plat. Impossible évidemment ici ! Quant à l’exercice au-dessus de la Meuse, c’est une descente verticale d’une quarantaine de mètres, avec système de freinage, réception des passagers par deux hommes-grenouilles dans un zodiaque, et retour sur la berge.”
Si l’exercice matinal a duré deux heures, celui de l’après-midi s’est déroulé comme sur des roulettes. En une heure trente, les cobayes avaient tous rejoint la terre ferme. Sans le moindre incident, avec le sourire et un sentiment de sécurité totale. “Nous sommes largement dans le délai imposé par la loi, conclut le sergent. Il faut dire que les conditions météos étaient optimales. Pas de pluie, pas de grêle, et surtout pas de vent. Nous n’avons pas dû non plus nous préoccuper d’un passager en panique. Si ça devait être le cas, nous disposons aussi d’un gros sac orange qui permettrait par exemple d’évacuer une maman avec ses enfants, un chien, une personne PMR ou une personne qui ne veut absolument pas voir le vide.”
Les pompiers de la zone Hemeco envisagent de répéter cet exercice d’évacuation (qui a suscité la curiosité des piétons et des automobilistes) trois fois par an. “Ça serait bien si on pouvait le réaliser une fois en début de la saison touristique, une fois au milieu et une fois à la fin.”
”On aurait presque envie qu'il tombe en panne”
Employées au service Enseignement et de la Petite Enfance de la Ville, Stéphanie Lahaye-Goffart et Valérie Dehennault ont été évacuées en matinée au-dessus du chemin des Chapelles. Sans le moindre affolement. “Franchement, je n’ai pas eu peur, c’est très rassurant, on se sent en sécurité”, commentait la première sur la terre ferme, alors que la seconde avait encore… des étoiles dans les yeux. “Je suis amatrice de sensations fortes, et comme c’est mon anniversaire aujourd’hui, cet exercice était un beau cadeau. J’aurais presque envie que le téléphérique tombe en panne pour le refaire (rire). Plus sérieusement, j’ai beaucoup d’admiration pour les pompiers qui sont super-professionnels.”
Yannick, l’un des quatre pilotes qui conduira la machine, a aussi été évacué par les hommes du Grimp en matinée. “Pour l’équipe amenée à faire fonctionner le téléphérique, c’était hyperintéressant de vivre cet exercice de l’intérieur, expliquait-il. Ça nous permettra de rassurer d’éventuels visiteurs crispés. Étonnamment, je n’ai absolument pas eu peur, et pourtant, je ne suis pas spécialement un amateur de sensations fortes.”
Gaëlle Schmitz a, de son côté, connu la panne au départ de la station Batta. C’est en descendant en rappel au milieu de la Meuse qu’elle a été délivrée. “Je dois bien avouer que j’avais peur. Surtout lorsque j’ai dû m’asseoir sur le bord de la cabine pour me laisser partir vers l’avant. Sur l’échelle de la peur, je suis au niveau 10 dans beaucoup de circonstances. Si j’y suis donc arrivée, tout le monde peut y arriver (sourire). Au final, je me suis sentie en super-sécurité.”